Raveau (Charente)
Localisation :
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Histoire :
Cette celle fut fondée entre 1150 et 1160 par le comte d’Angoulême
Guillaume VI (1140 - 1180). En 1295 elle héberge 4 ou 5 religieux. En
1317, Raveau devient prieuré et, les petites celles de Badeix (24/1),
Gandory (16/4), Rauzet (16/7) et Beausault (16/1) lui sont unies. Son premier
prieur fut Martin Juge . Ravaud possédait des droits sur des maisons
à Angoulême dans un quartier appelé “ Prieuré
de Raveau”, situé entre la porte du Palet et la place Mouchard
En 1577, l’acte suivant est passé :
En l’an mil cinq cent soixante-dix sept, au lieu de Grandmont, en la Marche,
a été présent et personnellement établi en droit,
vénérable personne frère Jehan Mosneron, religieux de l’abbaye
de Grandmont, chef d’ordre, prieur de N-D de Raveau, Rousset, Baudey (Badeix),
Gandory et de Beausault, membres dépendants dudit Raveau. Lequel de son
bon gré et volonté a subrogé, cédé, quitté,
délaissé à vénérable personne frère
François de Neufville, abbé (commendataire) de l’abbaye
de Grandmont, conseiller et aumônier du Roi notre sire, présent
et acceptant : savoir et tout et chacun des devoirs, cens et rentes à
cause des arrérages des rentes a prétendre audit Mosneron à
cause dudit Raveau et des susdits membres susnommés, en payement de cent
écus soleil, et que ledit Mosneron doit à son dit sieur Abbé
à cause des pensions qu’il lui doit pour raison de troubles qu’il
n’a joui dudit Raveau et de ses membres.
Et parce qu’il lui est redevable de ladite somme à cause des arrérages
de ses pensions de dix années dernières passées et révolues,
lui a cédé tous ses dits droits, nom et action et baille puissance
de contraindre tous ses tenanciers pour payer les arrérages de ses dites
rentes et devoirs de sept années passées révolues, et de
leur bailler quittance en son nom propre comme si lui même y était.
Et en tout cas qu’il sera refusant de payer de les contraindre par toutes
voies de justice.
.....
Mais tout au long du XVIIe siècle l’Abbé rencontre de grandes
difficultés pour faire entrer sa pension abbatiale.
Entre Dom Georges Barny, abbé de Grandmont, demandeur a ce que frère
Estienne Talin, religieux, prieur de N-D de Raveau, dépendant dudit Ordre,
fut condamné à luy payer tous et chacun des arrérages de
la pension annuelle et perpétuelle due à la mense abbatiale de
ladite abbaye depuis qu’il est prieur d’une part, 1647,
et ledit frère Estienne Talin, défendeur, d’autre part,
vu au Conseil,
Iceluy notre Grand Conseil a condamné et condamne ledit Talin à
payer audit Barny les deniers et quittances valables, les arrérages de
ladite pension de 27 livres 10 sols par chacun an échu depuis le jour
de l’Ascension 1647, continuer à l’avenir tant qu’il
sera possesseur dudit prieuré et condamne ledit Talin aux despends et
donnons en mandement
Les choses ne devaient pas beaucoup s’arranger, car l’abbé
est obligé de faire condamner le prieur Talin de payer la pension abbatiale
le 23 juin 1654 :
Louis par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre au premier des
huissiers de nostre grand Conseil... A la requête de notre bien-aimé
Dom Georges Barny, abbé de Grandmont, demandeur, te mandons contraindre
par toutes voies dues et raisonnables frère Estienne Talin, religieux
de l’Ordre, prieur de Raveau et de ses annexes, défendeur, a payer
audit demandeur la somme de cinq cent trente cinq livres douze sols sept deniers
...et que les dépends ledit défenseur a été condamné
par arrest du Roy au Grand Conseil du sixième may mil six cent cinquante
quatre. De ce faire te donnons pouvoir ...
Les choses ne devaient pas s’arrêter là, car l’Abbé
est obligé de faire saisir le revenu de Raveau le 25 mai 1660.
“Le vingt-cinquième may, mil six cent soixante, je sergent royal
soussigné, certifie à tous qu’il appartiendra qu’à
la requeste de frère Joseph Baubouin, procureur syndic de l’abbaye
de Grandmont, et par vertu de certains arrêts exécutoire de dépend
émane de nos seigneurs du Grand Conseil donné à Paris en
date du seizième may et vingt troisième juin mil six cent cinquante
quatre, signé par le roi et la relation des gens de son Grand Conseil,
Herbin et scellé du grand sceau à queue pendante,
Je me suis de la ville d’Angoulême ma demeure ordinaire, exprès
et à cheval, transporté jusqu’au lieu de Raveaux, paroisse
d’Haussac, distant de quatre grandes lieue, ou estant et au domicile de
Jacques Maistre, sieur de la Courrière, fermier du prieuré de
Raveau, je lui ai signifié et fait savoir le contenu en le susdit arrest
et exécutoire de despends afin qu’il n’en puisse prétendre
cause d’ignorance. Et en outre par vertu dudit arrest et exécutoire
des dépends j’ai saisi et arresté entre les mains dudit
Maistre toutes et chacune les sommes de deniers, fruits et autres choises qu’il
doit ou pourrait devoir par ci-après à frère Estienne Talin,
religieux, profès et prieur dudit prieuré de Raveau jusqu’à
concurrence des arrérages de la pension annuelle du par ledit Talin à
ladite abbaye de Grandmont à cause du prieuré de Raveau pour les
années mentionnées la somme de cinq cent trente cinq livres douze
sols sept deniers. Lui ayant fait inhibition et défense de par notre
roi notre sire de s’en dessaisir ne vider ses mains desdites sommes et
fruits jusqu’à ce qu’autrement par justice il en ait été
ordonné sur peine de payer deux fois et d’en répondre en
son nom privé et pour se purger par serment de quelle somme de deniers
il est débiteur audit Talin ou devra et sera débiteur par ci-après
et voir ordonner et faire plus ample saisie, j’ai dis au Maître
donne ajournement et assignation d’être et comparaître d’huy
en un mois prochain venant par devant nosdits seigneurs tenant le Grand Conseil
à Paris.
Et sur le tout autrement procédé comme de raison.
Et de mon présent exploit que j’ai délaissé au domicile
dudit Maistre parlant à sa servante en présence de Jehan Paranteau,
praticien demeurant à la ville d’Angoulême, et Jehan Billou,
laboureur à bras demeurant en la paroisse de Plassac, témoins
requis, reçu exprès. Ledit Billou a déclaré ne scavoir
signer...
Ces difficultés financières entraînent inévitablement
un manque d’entretien des bâtiments. C’est ce qui détermina
la communauté devant ce manque d’entretien à se transporter
à Badeix en 1680, cette dernière étant en meilleur état.
Un acte en fait mention : ‘Badey : permission donnée par l’Abbé
et le chapitre de Grandmont à la communauté du prieuré
de Raveau d’aller demeurer dans l’annexe de Badei”
Toutefois l’Ordre ne perd pas de vue Ravaud, et un prieur claustral y
est nommé par l’Abbé en 1716 :
Nous abbé général de l’ordre de Grandmont certifions
à qui appartiendra, que Dom Pierre Millet de la Haye, religieux de notre
Ordre a été par nous pourvu en règle du prieuré
régulier de Ravault, diocèse d’Angoulême en l’année
mil sept cent seize, comme l’un des quatre premiers prieurés vacants
depuis notre élection. En foi de quoi nous avons signé et scellé
ces présentes du sceau de nos armes, dans notre maison conventuelle de
la Faye de Jumilhac en Périgord.
le dix-huit mars mil sept cent trente-sept .
de la Guérinière abbé Général de l’Ordre
de Grandmont.
Quant aux prieurs commendataires, on n’oublie pas d’en pourvoir
Ravaud...
“Aujourd’hui douzième du mois de février mil sept
cent cinquante-trois nous notaire royal et apostolique en la ville et diocèse
d’Angoulesme soussigné,
requérant misérable et discrète personne messire François
Bonniton, prestre chanoine de l’église cathédrale Saint-Pierre
d’Angoulesme, demeurant en laditte ville d’Angoulesme,
nous nous sommes transporté en sa compagnie au lieu et ville de Raveau,
paroisse d’Aussac ou estant environs les neuf heures du matin ledit sieur
Bonniton nous a dit qu’il aurait été nommé par sa
majesté au prieuré conventuel et électif dudit lieu de
Raveau, ordre de Grandmont, audit diocèse d’Angoulesme vaquant
par le décès de Gibauld de Chastelut, dernier titulaire suivant
le breust qu’il nous a représenté en date du vingt trois
septembre dernier. Signé Louis, et plus bas Philipeaux.
Et nous a aussi représenté les bulles qui lui ont été
accordées par notre Saint Père le Pape, datées à
Rome le dixième des calendes de Novembre dernier et le forma justement
ensemble de l’acte de fulminassions desdittes bulles et d’un serment
presté par ledit Bonniton entre les mains de Monsieur l’officier
dudit diocèse en date du neuf du présent mois.
Et en conséquence il nous a requis de le mettre en possession réelle
actuelle et corporelle dudit prieuré, membre et annexe, fruits, profits,
église, maison, bâtiments, revenus, esmoluments et droits en dépendant
généralement quelconque ce que nous luy avons accordé.
Et a cet effet ledit Bonniton revestu d’un surplis et d’une estolle
est entré dans l’église dépendant dudit prieuré
situé audit lieu de Raveaux par la principale porte d’icelle a
pris de l’eau bénite, s’est prosterné à genoux
devant le grand autel, où il a fait sa prière et a sonné
la cloche, toutes lesquelles choses et autres en tel cas requises, il a faite
insigne la possession réelle actuelle et corporelle dudit prieuré,
église, maison, membre, annexe, bastiments, domaines, fruits, profits,
revenus, esmoluments et droits en dépendants et généralement
quelconque dont il a requis acte a nous dits notaire, ce que nous lui avons
accordé pour valoir et servir ce que de raison. Et a l’instant
ladite prise de possession a été lue, absoute, voye par nous dit
notaire au-devant de laditte porte d’église afin que personne n’ignore
dont nous avons aussi donné acte au sieur Bonniton lui requérant.
Fait et passé au-devant de ladite porte et principale entrée de
ladite église, jours et an susdits en présence de Jean Mouton,
prieur de l’abbaye de la Couronne, et y demeurant paroisse dudit lieu
et de messire Antoine Vousileaud, prestre-curé de Saint-Amand-de-Boixe,
et y demeurant les noms requis qui ont signé avec le dit sieur Bonniton,
et les soussignés présents à laditte prise de possession
aussi signé en la minute.
Bonniton, prieur de Raveaux et chanoine Mouton, prieur de la Couronne, Vousilaud,
curé de saint-Amand de Boixe, J. Fouille, P. Feuillade, G. Basset, et
Deroulede, notaire royal apostolique.
Contrôlé à Angoulesme le dix sept février mil sept
cent cinquante trois par Ardillier.
Le vingt sept mars mil sept cent cinquante trois l’acte ci-dessus acte
registré et insinué au présent greffe par moi greffier
soussigné Couturier.
Comment étaient les bâtiments de Ravaud ? Nous en avons un description
peu précise par l’adjudication du 2 Thermidor an 4 :
“ une maison composée d’une petite cuisine, salle, appartement
en forme de galetas, buanderie, four y existant, écuries, chais, cellier,
église, et basse-cour contenant environ 26 carreaux...”
La minute d’adjudication nous donne quelques précisions :
une maison composée d’une petite cuisine de 17 pieds de long sur
7 pieds 6 pouces de large (5,50 m X 2,40 m).
Une salle de 24 pieds de long sur 17 de large (7,80 m X 5,50). Une chambre haute
au-dessus d’icelle, un appartement en forme de galetas à coté
de ladite chambre haute qui se pratique sur la cuisine et salle, contenant 17
pieds au carré, et les murs de 19 pieds environ (6,15 m) de hauteur du
rez-de-chaussée.
une buanderie, dans laquelle est un vieux four hors d’état de service,
de la longueur de 17 pieds (5,50m)et douze de large (3,90m), et les murs dicelluy
dit fourniour, de huit pieds d’hauteur aussi environ,
une écurie de dix-sept pieds de long (5,50m), et douze de large (3,90m).
un petit chai de dix-neuf pieds de long ( 6,25m)sur dix-sept de large (5,50m).
Un petit cellier de dix-sept pieds de long (5,50m) sur douze (3,90m)de large
ayant ainsi que les deux autres objets précédents ses murs de
seize pieds de hauteur environ, au rez-de-chaussée une église
de quatre-vingt-dix pieds de long (29,70m), et dix-huit de large (5,95m) d’environ
vingt-quatre pieds (7,92m) d’hauteur, une basse-cour, contenant aussi
environ vingt-six carreaux.
Enfin une grange séparée desdits bâtiments, menaçant
ruine, de trente-six pieds de long sur trente de large et de dix pieds de hauteur.
Parmi lesquels bâtiments, on a remarqué a différents endroits
et notamment la porte et le portail de la basse-cour hors de service. L’escalier
en pierre par lequel on monte dans la chambre haute ayant besoin d’être
refait, et que la majeure partie des charpentes est très antique, que
cependant l’église qui est couverte en pierres plates est en fort
mauvais état.... “
Le prieuré est adjugé au sieur Jean Nadaud le 2 thermidor an 4
(20 juillet 1796), au prix de 4.794 livres .
Ce dernier transforme le prieuré en carrière de pierre, du moins
ce qu’il en reste car à la Révolution l’aile Est et
le bâtiment Sud ont disparus. Il revend une partie de son acquisition
le 30 novembre 1805, à Jacques Rouffet maçon de son état,
mais Jean Nadaud se réserve un droit de passage :
“pour charroyer et enlever les pierres de taille et autres pierres des
domaines qu’ils se réservent, de même que pour charroyer
et enlever les pierres de taille du susdit domaine vendu, en ce que toutes les
autres pierres moellons dusdit domaine vendu appartiendront audits acquéreurs
des bâtiments compris dans ladite vente, et qui font partie des objets
vendus audit sieur Jean Nadaud par l’administration du département
de la Charente, par acte d’adjudication du deux thermidor an 4, comme
dépendant du ci-devant prieuré de Raveaud.... ”.
Les deux familles vont démolir le prieuré, ou ce qu’il en
reste. Mais un litige entre les deux propriétaires survient. Jean Nadaud
accuse Jacques Rouffet d’avoir dérobé,et de le voir “condamner
de remettre aux requérants deux manteaux de cheminée en pierre
de taille, et deux croisées aussi en pierre de taille, cinq crochettes
aussi en pierre de taille, et deux pierres aussi de taille, qu’ils ont
prises sur la propriété que les requérents leur ont vendu
par contrat...”
Puis les rapports s’enveniment, les parties s’accusent mutuellement
de vol de matériaux :
“En exécution de la convention, les demandeurs ont passé
dans le passage réservé, et ont enlevé plusieurs charrois
de pierre qui étaient démolies et éparses ça et
là sur le terrain vendu, sans aucun empiétement de la part des
défandeurs.
Ceux-ci ayants démoli quelques pierres de taille dans un mur qui est
placé sur le terrain, qu’ils ont acquit, les frères Nadaud
ont prétendu que cette pierre leur appartenait, et ont formé la
demande en restitution de cette pierre ou son paiement.
Les défendeurs, de leur coté ont prétendu que les Nadaud
ont considérablement dégradé un mur de la ci-devant église
du prieuré de Ravaud, qui est commun et mitoyen entre eux et les bâtiments
qu’ils ont vendu aux défendeurs, en conséquence ils ont
demandé...”
Enfin le partage des restes de Raveau se fait devant notaire le 2 janvier 1817.
“ 1° il restera en toute propriété audit Rouffay la
totalité des bâtiments à partir du chemin qui d’Aussac
conduit aux fontaines de Raveau et a droite dudit chemin et la cour au devant
desdits bâtiments de la largeur par chaque bout de dix mètres en
ligne droite et traversant la démolition de l’église du
coté des bâtiments dudit Rouffay..
2° le surplus des autres bâtiments, cour et jardin et église
demeurera au sieur Hériaud en toute propriété...”
Près de deux siècles se sont passés et les pauvres restes
du prieuré de Raveau se trouvent toujours morcelés entre plusieurs
propriétaires...