L'église
(32m x 6,86m) est entière, une des plus belles des églises
grandmontaines subsistantes. L'abside est voûtée en briques,
cachées par un revêtement. Elle est à cul-de-four
à cinq pans, trois pour le triplet, et deux sur des arcatures aveugles.
Elles sont séparées par six colonnettes, qui portent des
petits chapiteaux décorés de feuilles d'eau, se continuant
sur l'encadrement du triplet et des arcatures par cinq fines nervures
toriques. Sur
le coté Épître, une piscine double à deux arcades
séparées en façade par deux colonnettes accolées.
Une feuillure se trouve à l'entrée de la piscine à
double arcade laissant penser qu'elle était clôturée
par deux vantaux en bois, permettant d'y déposer des objets qui
n'avaient pas de caractère sacré: burettes, navette, encensoir,
etc. Chaque plateau de la piscine est creusé d'une cuvette carrée.
Dans le mur du fond, à une vingtaine de centimètres au-dessus
du plateau, se trouve une entaille horizontale à section semi-circulaire
de 0,50m de long sur 0,06m de diamètre. elle se termine, à
droite, par un conduit qui se perd dans l'épaisseur du mur. Viollet-le-Duc
en donne la signification: "Peut-être cette entaille est-elle destinée
à recevoir le chalumeau eucharistique" . Si nous adoptons cette
explication, celle-ci laisse à penser que les Grandmontains au
XIIe et au XIIIe siècle et même plus tard, pratiquaient la
communion sous les deux espèces. Ce qui est très vraisemblable,
car cet usage persista longtemps dans d'autres communautés comme
Cluny. photo
: angle Nord-Est du cloître La
nef est voûtée en brique, et comme toute église grandmontaine,
en berceau brisé revêtue, comme l'abside, d'un enduit il
y a quelques années.
Propriétaire
Président : M Bernard Léger.
Secrétariat et bibliothèque de la Société
sont ouverts tous les mercredi après-midi, à l'Hôtel
Gouvenain à Avallon.
L'église
La
piscine double
A l'extérieur, la porte des fidèles au Nord, s'ouvre dans
une surrépaisseur surmontée d'un talus. Il est à
trois voussures en tiers-point à gros tores. Les retombées,
se font, pour la première et la troisième voussure sur des
piédroits dont les angles vifs sont amortis par une colonnette
au trois quart engagée, qui portent un chapiteau rudimentaire.
La deuxième voussure est portée par une colonne en délit
avec chapiteau à crochet, et une base à tore aplati. Les
tailloirs épais, profilés d'un bandeau et d'une scotie forment
un entablement continu.
Au chevet quatre belles colonnes en délit encadrent le triplet.
Chaque colonne supporte un chapiteau à crochets, lui-même
surmonté d'un haut talus.
Le pignon Ouest est percé par une grande lancette; à sa
base se trouve un gros boudin sur la largeur du pignon.
Bâtiment
Sud.
Cette aile occupée autrefois
par la cuisine et le réfectoire, n'a gardé que son mur extérieur.
Dans le mur séparant le cellier du bâtiment Sud se trouve,
coté cuisine, encore les éléments d'une cheminée
avec son foyer en brique, et un des jambages. Une partie de cette cheminée
a été récupérée par un ancien propriétaire
de St.-Jean et remontée dans une maison de Givry. La cuisine et
le réfectoire, étaient éclairés par huit lancettes
dans le mur Sud, ébrasées intérieurement. Au bout
dans une petite maison le passage qui longe le bâtiment des hôtes.
Ce passage est voûté, ainsi que la pièce au-dessus.
photo
: l'angle Sud-Est
Michel Fougerat
En venant d'Avallon par sa sortie
Nord-est (Z.I) prendre la D 957 en direction de Sauvigny-le-Bois. A l'entrée
de Sauvigny prendre une petite route sur la droite en épingle à
cheveux qui conduit directement au prieuré (lieu fléché).Si
vous êtes intéressé par un site sur les trésors de
l'art roman bourguignon consultez : http://www.bourgogneromane.fr.vu
ou http://mydas.ath.cx/bourgogneromane/edifices/sauvignylebois.htm
Histoire :
Cette celle semble avoir été fondée en 1189 par Anséric
VI, seigneur de Montréal, avant son départ pour la troisième
croisade. Il donna aux religieux :“un enclos entouré de fossés
de toutes parts, d’un demi-lieu de circuit, c’est-à-dire
environ 500 arpents d’étendue, en bois, prés, terres”
. Sa femme Sibylle de Bourgogne approuva après le départ de son
mari cette donation faite aux ermites de l’Ordre de Grandmont. Anséric
VI devait périr en Terre Sainte dans cette expédition en 1192.
C’est seulement par une charte de 1217 donnée par Anséric
VII, fils du fondateur, confirmant les dons de son père et y ajoutant
plusieurs libéralités, dont deux hommes du village : Martin Gobilet,
et Guy du Bois, avec leurs manses, et leurs descendances , que nous pouvons
supposer les circonstances de la fondation. Quant à ces deux serfs et
à leur famille donnés par Anséric VI, les religieux durent
se conformer aux prescriptions de l'Église, qui demandait aux maisons
religieuses bénéficiaire de cet sorte de don, qu'elles leur rendent
la liberté. Ce qui fit que ces sortes de donations n'eurent plus cours,
et le travail de ceux-ci (tâches de construction et d’exploitation),
fut rempli par les frères convers, qui étaient souvent d’anciens
serfs. Profitant du terrain argileux local une tuilerie avait été
créée à cette époque, vraisemblablement par eux
pour leur besoin. Ce qui leur permit de fabriquer également les briques
dont ils se servirent pour voûter la chapelle. Par la suite pour accroître
leurs revenus, ils fournirent leurs produits aux bourgeois d'Avallon . En 1438,
la ville d'Avallon commanda à la tuilerie de Charbonnières 20
milliers de tuiles, un cent de cornillés (faîtières) et
80 carreaux de foyers. Puis plus tard la tuilerie dut fournir cinq milliers
de tuiles pour couvrir les tours des remparts d'Avallon . Cette activité
s'est perpétuée jusqu'à la Révolution, avec peut-être
une période d'inactivité après 1576, date à laquelle
les bâtiments de Charbonnières furent en partie détruits
par les lansquenets allemands à la solde du Huguenot Casimir des Deux-Ponts,
car vers l'an 1600, une tuilerie dut être créée à
Avallon même, pour continuer à satisfaire les besoins de la population
, mais la qualité en était médiocre . La tuilerie dut de
nouveau être remise en état, et était en activité
en 1776, car on trouve dans les jours de la justice de Charbonnières
en date du 14 décembre 1776 un acte de conservation des droits des mineurs
de Michel Michoux, "thuillier" de la Tuilerie de Charbonnières.
Un des témoins, son frère, Étienne Michoux habitant Bierry,
est déclaré comme "compagnon thuillier " .
Les religieux reçurent de nombreux dons. En 1205, Ancelin de Merry, chevalier
avec l'assentiment de Marie, son épouse, donna une vigne sur le mont
de Rouvre . En 1208, dame Pétronille, veuve de Pierre d’Almansa
ratifia la donation de deux vignes sur le mont d’Island . En 1215, Evrard
de Bourgoin, d’Avallon, avec le consentement de sa femme Jacqueline, donne
une charge de raisin à prendre chaque année sur sa vigne de Vallansaut
. En 1218, une charte du chapitre d'Avallon atteste que Guillaume d’Étaules,
chevalier, donne aux religieux de Charbonnières un setier de froment
sur ses tierces, du consentement de Julienne, sa femme, et d'Agnès sa
fille. En 1236, Joscelin d’Avallon, chevalier, donna deux muids de vin
sur son clos du mont de Vallansaut, puis 10 sols de rente sur son cens d’Oligniacum,
pour le repos de l’âme d’Adélaïde, sa femme, avec
la permission de sa mère Agnès, de son frère Renaud, et
de sa soeur Élisabeth . Ces dons devaient être transformés
en 1283, par son fils Eudes en une rente de 6 livres et 10 sols.. Par un échange
d’une vigne à Étaule contre une autre sur la route d’Avallon
à Marcilly, fait en 1215, nous connaissons le nom du correcteur de la
celle, Pierre Deschamps qui passe contrat avec Girard d’Étaule
. En 1272, Hugues Le Rebors et sa femme Odette d’Avallon, firent remise
d’une obole que les frères devaient sur une vigne de Mauperthuis
, etc
En 1280, il y aurait eu une communauté de treize moines , mais en 1295
il n’en restait plus que cinq . Il est possible que dans le premier recensement
les convers étaient compris, convers disparus en partie après
leur révolte.
En 1283, le frère Bertrand, correcteur de Charbonnières reçoit
au nom de sa communauté une vigne de Guillemette, dame d'Étaules,
pour le repos de son âme .
Le vendredi après la Saint-Jean-Baptiste 1311, un échange de vigne
est fait entre le correcteur le frère Pierre Deschamps et Girardin d'Étaules
.
Le 15 décembre 1317, Charbonnières fut uni à Vieupou par
la bulle du Pape Jean XXII. Devenu simple annexe le bien fut géré
par un religieux responsable, qui était à cette époque
le frère Hélie du Bois, peut-être de la famille de l'un
des serfs donnés par Anséric VII. Avec la disparition des frères
convers, il était nécessaire de donner les terres en location,
et ce religieux dut également défendre les droits de haute, moyenne
et basse justice, qui resteront au prieuré, à condition que les
amendes prononcées pour les délits de basse justice ne dépassent
pas 3 livres et 5 sols .
Même après la réforme de l’Ordre réduisant
le rôle de Charbonnières à celle d’annexe, les religieux
reçoivent des dons. En 1329, Eudes de Bourgogne renonce à toutes
ses redevances féodales sur les vignes d’Étaules en faveur
des grandmontains.
En 1347, le Pape Clément VI promulgua par une bulle, le montant des pensions
dues par les annexes et prieurés, au chef d'ordre. La contribution de
Charbonnières fut fixée à 9 livres 15 sols .
En 1402, le frère Bernard Masseré, maître de St Jean-les-Bonshommes,
obtient de Jeanne de Germoles, dame de Regny, une reconnaissance portant sur
un setier de froment, et un setier d'avoine . A noter que c'est la première
fois qu'apparaît le nom de St-Jean-les-Bonshommes. St Jean devait être
le patron secondaire de la celle, car toutes les celles grandmontaines sont
toujours sous le patronage principal de la Sainte-Vierge.
En 1424, le responsable de la celle, Jean Cheney, achète trois journaux
de pré à Guillaume Godoz, de Chassigny pour 9 fr. or , puis en
1427, le même religieux achète une maison à Avallon pour
75 écus d’or , et en 1428, le prieur Jean Cheney, titre donné
dans l’acte, achète à Martin Jouanneau, de Chassigny un
journal de terre . En 1432, le gouverneur Jean Cheney, nouveau titre, achète
à Henri Moreau, d’Avallon, une pièce de terre de 5 journaux
: “tenant au chemin de Chassigny à la Couldre, et à la terre
de Monsot de la Chaume, pour la somme de cinq escus “. Puis un autre religieux
vient remplacer Jean Cheney en 1438, ce fut Pierre Guillon, qui achète
d’abord le 8 mars 1438 un journal de terre à Chassigny au lieu-dit
la Praelle, et le 9 avril 1439, un autre journal de terre situé sous
le “grand chemin” à Martin Jouanneau, qu’il loue le
13 juin 1439 à Philippe Michiel, de Chassigny.
Le 21 janvier 1444, les religieux de Charbonnières par l’intermédiaire
du très actif prieur achetèrent : “une maison, cour, courtil,
aisances et appartenances et la moitié du puits commun, avec une autre
maison, situées à Avallon rue de la Boucherie , au marché
du samedi ” à Laurent Vaichart, prêtre, chanoine d'Avallon,
moyennant la somme de 80 écus d’or fin, et 40 francs en vieille
monnaie . Sans doute appréhendaient-ils des jours plus funestes, comme
les moines de l’Enfourchure, qui avaient leur maison à Joigny pour
pouvoir se replier en cas de danger. Ce qui ne manqua pas d’arriver peu
de temps après. Mais jusque là la communauté semblait vivre
sinon dans l’opulence tout au moins dans un certain confort. Un état
des biens et rentes du prieuré de cette époque dit : "la
maison de Charbonnières est enclavée dans la paroisse Saint-Martin
du faubourg d'Avallon, à un quart de lieue de la ville. Elle contient
une demi-lieue de circuit, c'est-à-dire environ 500 arpents d'étendue,
en bois, prés, terres, vignes, jardins, bâtiments et un étang
. formant un enclos entouré de fossés de toutes parts qui le sépare
des terres de Sauvigny-le-Bois."
Le Chapitre général tenu à Grandmont en 1473 mettait en
garde les religieux qui au mépris de la règle portaient des vêtements
d’étoffes précieuses. Le chapitre préconisait des
vêtements de laine et non de soie, jamais de souliers à la poulaine,
jamais de chapeaux, si ce n’est en voyage, etc.
Profitant du relâchement qui s’était introduit dans l’ordre,
certains seigneurs essayèrent de s’emparer des biens ou des droits
de ses maisons. En 1485, Girart Delay, seigneur de Bellegarde, Jean de Damas,
seigneur de Marcilly, et Jacques de Chaugy, seigneur de Chassy, tous trois co-seigneurs
de Sauvigny-le-Bois contestèrent au prieur, le frère Guillaume
Moreau, ses droits sur la haute, moyenne et basse justice. Le prieur réagit
vigoureusement. Il réunit tous ses titres dans un volumineux dossier
et saisit le bailli de l’Auxois. Il obtint gain de cause le 13 Mai 1486
dans une sentence qui le "maintenait dans l'exercice de toutes justices,
hautes, moyennes et basses, et le pouvoir de nommer et établir des officiers,
et de recevoir les amendes à lui adjugées ".
Le 18 janvier 1498, le prieur mit en location pour neuf ans l'intégralité
des biens du prieuré à mi-fruits à deux cultivateurs :
Jacob Girot et Pierre Bailly, avec une clause permettant à leurs enfants
de continuer l'exploitation du bien en cas de décès de l'un des
contractants .
Au début du XVIème siècle un différent opposa le
prieur avec le chapitre d'Avallon qui prélevait un droit de minage sur
le marché d'Avallon, droit que le prieur prétendait ne pas avoir
à payer. Un procès s'ensuivit que le prieur perdit en 1511, et
il dut pour dédommager le Chapitre, lui fournir six milliers de "cuittes"
(tuiles) provenant de la tuilerie de Charbonnières, à raison de
deux milliers chaque an, pendant trois ans .
Le frère Hugues Nargeot, prieur des Bonshommes achète le 28 décembre
1516, une vigne de quatre ouvrées et demie aux Crais, sur Sauvigny .
Il achète l'année suivante un pré, et sur l'acte d'achat
figure le nom d'un religieux, le seul qui réside à Charbonnières
: Claude Berry. Il fut remplacé peu de temps après par Hugues
Nargeot.
Vint la Guerre de Cent Ans, puis les guerres de religion, moments qui furent
funestes à Charbonnières. En 1518, à la mort du prieur,
le frère Hugues Nargeot, les meubles “du prioré et maison
de Plauxe, alias les Bons-Hommes de Charbonnières près d’Avallon”
furent placés sous scellés pour empêcher qu’ils ne
fussent mis au pillage ou volés. Ce qui laisse penser que le prieuré
n’était plus habité. Lors de sa venue le nouveau prieur,
le frère Edmond Touchard, réclama le 8 janvier 1518 la mainlevée
au lieutenant du bailliage d’Avallon, Thiébaut Barbette, qui “pour
le danger de peste régnant audit Avallon” habitait Annay-la-Côte
.
Des troubles durent-ils survenir, ou Edmond Touchart dut-il quitter momentanément
Charbonnières? Si bien qu’en 1520, lors de son retour avec des
religieux, ils trouvèrent le prieuré occupé par un intrus,
Guillaume Josserand, qui s’était mis en jouissance des biens; il
prétendait que le prieuré n’appartenait pas à l’ordre
de Grandmont. Le frère Edmond Touchart fut dans l’obligation de
renvoyer les religieux à Vieupou, et d’entamer une procédure
auprès du bailli de l’Auxois. Celui-ci donna mainlevée des
saisies opérées par Josserand, et ordonna l’expulsion de
l’intrus.
Nos religieux n’étaient pas au bout de leurs peines, car l’année
d’après, en 1521, après la Toussaint, un homme nommé
Guillaume Giroul, “jeune fils à marier, du village de Vaux de Lugni”
est accusé d’homicide sur un habitant d’Etrée, un
nommé Étienne Rémond. Craignant les rigueurs de la justice,
Guillaume Giroul était venu se réfugier au prieuré pensant
bénéficier de l’immunité des religieux. Dans ce refuge
il écrivit au Roi pour obtenir grâce et pardon. Mais il fut capturé
par les “nommés Estienne Rémond, Jean Rémond, et
fils de Jean Rémond dict Gendarme, de Maigny, et Philibert Pigeon, d’Estrée,
bien embastonnez et armez de picques, puis la feste de la sainct Martin d’hyver
dernièrement passée, certain jour environ la nuit, entrent par
force dans ce lieu d’asile, enlèvent Guillaume Giroul, le mènent
de nuit et de jour par Maigny et Cussi-les-Forges, et le font cloure et détenir
es prisons du chastel de Presles”.
Le frère Edmond Touchard :“ne voulant voir méconnu, et foulés
aux pieds les beaux droictz, privilèges, immunitez, franchises et libertez
qui luy compétent et appartiennent et dont il a toujours joui et usé
paisiblement tant par luy que par ses prédécesseurs et religieux
de la maison des Bons-Hommes d’Avallon, au diocèse d’Autun,
par tel et si long temps qu’il n’est mémoire d’homme
au contraire”.
Les religieux réclamèrent sa réintégration, attendu
l’immunité ecclésiastique dans leur franchise, en adressant
une lettre au roi François 1er, dans laquelle ils exposent que : "tous
les manans et résidans dedans la cloiture et territoire de ladicte maison
des Bons-Hommes, bien divisé et limité par grants foussez et terrelles
circuïant l’édifice, chapelle, maison, granges, bois, buissons,
prés, eaux, vergiers, terres labourables en toutes manières, et
pareillement les estrangers chargez et poursuivis de crime capital envers la
justice pour aulcuns cas par eux commis et perpétrez, qui se seroient
retraittez et retrahez dedans ladicte cloiture, doivent jouir et user de l’immunité
ecclésiastique, tellement que d’aucuns lieux estant en icelle cloiture
et territoire, n’en peuvent licitement estre extrahez, fais prisonniers,
ny mis hors, par aucune puissance de justice laye ou aultres personnes layes”.
Les religieux eurent gain de cause. Par lettre datée de Dijon du 17 décembre
1521, François 1er ordonna “ à ses amés, maistres
Jean Gueniot, Pierre Blainche, et Pierre Vautherin, licenciés ès
droits” de faire réintégrer le sieur Giroul “en ladicte
franchise et immunité de l’église de Grandmont, contraindre
et faire contraindre à ce faire les spoliateurs dénommez, par
toutes voies et manière de contrainte deue et raisonnable, nonobstant
opposition ou appellations quelconques faites ou à faire quant à
la réintégrande”, et le nommé Giroul fut restitué
aux religieux quatre jours après par les auteurs du rapt, Étienne
Rémond, Jean Rémond, et Philibert Pigeon. Ils étaient accompagnés
du commissaire du Roi, Pierre Tircuyr. Ils ramenèrent Giroul ; “par
dessous les bras et autrement, le reconduisent dedans le pré dit le Pertuis
de la Goulotte, où ils l’avoient prins, et le remettent ainsy à
frère Claude Berny, religieux et procureur de la maison des Bonshommes
”. Les "spoliateurs sont adjournez d'huy en quinzaine" pour
être condamnés. Quinze jours après ils comparaissent accompagné
de leur suzerain Hugues, le seigneur de Marrault et de Magny. Ce dernier proteste
de sa bonne foi, n'ayant connu la vérité que par la réintégrande,
en conséquence il est mis hors de cause. Quant aux "spoliateurs"
ils plaident leur innocence n'ayant agi que par "ignorance rustique",
et ils sont condamnés aux dépends.
Il ne restait plus que deux religieux à Charbonnières, le procureur
Claude Berry, et le frère Léonard Delacour. Mais en 1524 Claude
Berry est nommé prieur claustral à Vieupou. Léonard Delacour
reste seul à Charbonnières pour gérer le bien. Il baille
à rente une vigne à François Montenat en 1528 . En 1533,
manquant de ressources, il loue à vie à Michel Antoine, marchand-libraire
, une maison “de présent en ruines, appelée la maison des
Bonshommes, assise audict Avalons, rue du Pas-François “. Claude
Berry est de retour en 1531 au prieuré de Charbonnières comme
simple religieux. Le 7 juin 1552, il est dit : “frère Claude Berry,
religieux de Vieupou à présent et dès trente ans demourant
audit prieuré Notre-Dame-de-Plausse, aultrement dict Sainct-Jean des
Bons-Hommes “. C’est lui qui loue pour six ans "en l'absence
de son prieur Messire Léonard Déy, Docteur en saints décrets,
protonotaire du Saint-siège apostolique, prieur commendataire du prieuré
de Vielpoil, au diocèse de Sens, à Nicolas Gaignault, marchand,
demeurant à Provency-près-lez-Avallon le 6 novembre 1552 le domaine
de St Jean, comprenant propis, maisons, granges et vergiers, cours, buissons,
taillis, estang, labourages, herbages, et pâturages, église et
bois, enclos de fossés avec un étang, se peult comporter d'une
demi-lieue et plus, droit de justice, censes, rentes, et autres droits à
Nicolas Gaignault présent et acceptant." moyennant la somme de 300
livres en argent et 4 muids de blé, et se réserve sur la tuilerie
de Charbonnières “trois cuites de fourneaux “.
Le 30 septembre 1563 pour payer les taxes destinées par le Pape pour
défendre la religion catholique, le prieur de Charbonnières fut
dans l'obligation de vendre, une pièce de terre de 23 journaux appelée
le champ Micheau, pour 161 livres; une vigne sise à Sauvigny pour 102
livres, et un pré de 60 arpents dans l’enclos du prieuré
pour 1466 livres, ainsi que les droits de justice estimés à 60
livres, le tout au profit du Seigneur de Sauvigny-le-Bois, Michel de Chaugy
. Mais l’acte du Pape ainsi que l’ordonnance royale qui l’avait
suivie stipulait que les maisons religieuses pouvaient prétendre à
récupérer leurs biens en reversant à l’acquéreur
le prix d’achat. C’est ce que parvint à faire le prieur de
Charbonnières le 28 décembre 1564, en versant la somme de 1789
livres à Michel de Chaugy, en présence du bailli de l’Auxois.
La guerre civile désolait la France, malgré la misère qui
en découlait, les religieux reçurent le 22 octobre 1574 de "Siméon
Soulier, prebstre, natif d'Anet-la-Couste et demourant de présent à
St-Jean-les-Bonshommes" deux ouvrées de vignes, à charge
de prières pour le repos de son âme .
L’insécurité allait grandissante, un religieux de Charbonnières
fut étranglé par un soldat enrôlé par les catholiques.
Celui-ci sera exécuté pour son forfait en 1577 à Avallon
En 1576, treize mille reîtres et lansquenets allemands à la solde
du huguenot Jean-Casimir des Deux-Ponts dévastèrent les bâtiments.
En 1578 un état des lieux constatent : “qu’il ne restait
en touz les batimens sinon les murailles desquelles est enceinte l’église”.
Et un autre procès-verbal donne les détails suivants :
“A St-Jean-les-Bonshommes ou Nostre-Dame de Plausse ou de Charbonnières
sur la paroisse de Maigny, la grange a besoing de réparer dans sa charpenterie
; le réfectoire de même, et une solle sera mise au pan de bois
le séparant du cellier, lequel refectoë est plein d'eau, vu qu'un
conduit passant dessoubs doit être bouché ou gastê; le cloistre,
a besoing de recouvrir; l'allée menant aux chambres des religieux doibt
estre recarrelée et replanchée par partyes, ainsy que refaict
le mur séparant lad. allée du grenier; la chambre où demouroit
le métaïer ayant esté bruslée, besoing de refaire
de fond en comble, et aussy la chambre du prieur avec une cuisine à faire
à cousté » les maçons, dont la visite ainsi consigné
a pour but d'estimer les réparations nécessaires, déclarent
en fournissant les mathereaux, sable et pierre de taille que fault aller chercher
à plus de deux lieues, ne feront pas à moins de cinq cent escus
; et le charpentier «ne voudra, faire la charpenterie nécessaire,
bien et deüment, à moins de 70 escus » .
Par la suite on demanda en 1579 au maître particulier des Eaux et Forêts
afin de remettre en état les bâtiments, l’autorisation de
couper 400 chênes dans les futaies du prieuré pour en consacrer
le prix de la vente aux réparations du prieuré de Vieupou et de
son annexe St.-Jean. Mais quand l’autorisation fut accordée en
1585, les travaux à St.-Jean étaient faits. Il faut dire qu’ils
n’étaient pas très importants. On avait édifié
près de la porte d’entrée deux chambres, une haute avec
grenier, et l’autre basse; et que les travaux s’étaient élevés
à la somme de 1178 livres .
Le prieur commendataire de Vieupou et de St Jean les Bonshommes : Claude Le
Prince avait des attaches à Avallon, car on le trouve parrain le 25 juin
1581, de Marie, fille de David Bierry .
Une communauté d’un ou deux religieux devait occuper les lieux,
mais en 1604, il n’en restait plus qu’un, et encore rarement présent
; de plus une plainte était déposée contre lui car il fréquentait
son ancienne servante à Sauvigny.
Le 27 juin 1606, un procès-verbal de visite du"prieuré"
est dressé :
Le mardy vingt-septième jour du mois de juin mil six cent six, nous Guillaume
de Berbis, docteur en droit, conseiller et lieutenant au bailliage d'Avallon
à la poursuite et enquête de vénérable et discrète
personne M Claude Le Prince, prieur de Vieupou et St Jean les Bonshommes son
autre prieuré, nous nous sommes transportés et acheminés
audit prieuré des Bonshommes, et là Le Prince assisté de
Me Jean Rignaud, juge de la justice dudit prieuré, son avocat Grontier
pour l'affaire au jugement rendu par nous le samedy vingt septième jour
de may 1606, et la cause de laquelle le dit Leprince s'est rendu demandeur par
requête contre honorable homme Lazare Naulot, admodiateur dudit prieuré
comparant pour dame Anne Sanot, sa femme, Thomas et Olympe Naulot ses fils assistés
de Maître Pierre Gassey, son advocat et conseiller où étant
suivant l'assignation donné le jour d'hier à la requête
dudit Leprince par Jachet sergent royal, nous nous sommes transporté
sur le lieu et la grange dudit prieuré où le sieur Le Prince nous
a fait montré un pilier de bois au bout de la dite grange est fort usé
et comme moisi par le pied. Le pilier pourrait tomber et ne porter sa charge
et apporter grand dommage... ".
N'ayant plus de communauté, on voit que le prieuré n'intéresse
plus que sous son aspect de rapport, et les réparations circonscrites
aux seuls bâtiments d'exploitation.
En 1617, le prieur commendataire de Vieupou et de son annexe de St Jean, Claude
Le Prince, chanoine d’Auxerre, décide d’installer son neveu
comme maître de N.-D. de Charbonnières. Mais cette nomination est
illégitime, et malgré toutes les démarches qu’il
entreprendra il sera mis en demeure d’y renoncer. Il essayera de remplacer
à ce poste par un religieux d’une autre obédience. Le Parlement
de Dijon sera saisi et cassera la décision du commendataire et le condamnera
à une amende de 10 livres ainsi qu’aux dépens .
Un procès-verbal de visite de 1619 établi par le frère
Étienne Bernier, religieux envoyé par le prieur de Vieupou, assisté
du religieux Bernard Delacourt, constate que les bâtiments sont à
l’abandon, et en état de ruines: "En premier lieu avons entré
dans l'église; la vitre devant l'autel était rompu par un orage
de grêle. Vingt chaises aux deux côtés de ladite église
sont rompus, cinq ou six qui puissent être refaites. Dans cette église
plusieurs endroits au-dedans tout inondé, où il n'y a point de
carreaux....". Le prieur désirant mettre une colonie de quatre religieux
à Charbonnières est dans l’obligation de procéder
aux réparations. De plus il manque du mobilier et pas d’habits
sacerdotaux :
“il n’y a qu’une chasuble de camelot vert, une aulbe, une
autre aulbe toute déchirée, un messé tout déchiré
dont le prêtre desservant ne peut se servir, en ayant un d’emprunt,
un calice d’étain et sa platine tout rompu, sans burettes, ny corporaux,
ayant deux corporaux à lui appartenant, cinq nappes usées, et
rien de plus “.
En attendant qu’une nouvelle communauté puisse s’installer,
un prêtre séculier, Jean Coursin, assurera à partir de 1619,
le service divin trois fois par semaine, dimanche, mercredi et vendredi dans
la chapelle, moyennant la rémunération de 60 livres par an. En
1624, un autre prêtre séculier, Lazare Dorey, assurera le même
service pour une rémunération de 72 livres annuelles .
En 1626, dans un procès-verbal de visite du Grand Maître des Eaux
et Forêts, Germain Leclerc, donne l’état des lieux. Il trouve
sur place un religieux nouvellement arrivé de Vieupou, le frère
Bernard Delacourt, qui est ”malade et incommodé d’une jambe”.
Dans l’église une des fenêtre du triplet a sa vitre rompue
par la grêle. Les vingt stalles sont en mauvais état, cinq ou six
seulement sont en état de servir. L’eau séjourne dans la
nef, il faut faire un fossé autour de l’église pour y remédier.
Le cloître est sans porte, et les bestiaux y entrent. Il pleut dans les
greniers, “à cause de la toiture qui est fort indigente de réparations”.
Le dortoir des religieux “fort les murs encore bons” doit être
réédifié. L’infirmerie est réduite à
une muraille... Le rapport que Germain Leclerc dut remettre n’eut d’effets
que huit ans plus tard. Le 10 mars 1634, la Cour de Dijon rendit deux arrêts.
Le premier enjoignait au prieur de Vieupou de faire réparer les bâtiments
pour les rendre habitables. Le second ordonnait au fermier de se dessaisir du
prix de sa ferme, pour faire face aux dépenses de ces réparations.
Dès 1632, le prieur de Vieupou Étienne Bernier avait entamé
des réparations, mais minimes vu la somme dépensée, 230
livres 10 sols. Pour faire face à la totalité des travaux il avait
besoin de fonds très nettement supérieurs. Aussi demanda-t-il
la permission de procéder à des coupes de bois, mais il ne reçut
pas de réponse. Les bâtiments resteront à l’état
de ruines jusqu’en 1659.
Le 11/07/1634, un arrêt du Conseil privé du Roi adjuge à
M de Chavaroche le prieuré de Vieupou contre les prétentions de
Raoul Favier, comme légitimement pourvu par M de Tautal, Abbé
de Grandmont, en vertu de son privilège des quatre premiers vacants par
brevet de Rome ou du Roy .
Le nouveau prieur de Vieupou ne resta pas inactif. Il louait ses terres et ses
vignes. Il essayera de récupérer en 1639 la maison qui avait été
louée en 1533 au marchand-libraire Michel Antoine, rue du Pas-Français
à Avallon, auprès de ses héritiers. Mais cela ne laissait
que des revenus bien maigres. Il essayera d’économiser en refusant
de verser les décimes imposés par la Chambre ecclésiastique
d’Autun, mais là ayant pris un mauvais prétexte, une erreur
de plume portant “cure de Charbonnières” au lieu de “monastère”,
il fut débouté, et dut payer les décimes plus les dépens
se montant à 2.000 livres ! Alors qu’il n’avait qu’à
se référer aux dispenses de taxes accordées par Charles
V en 1373, ou mieux à l’exemption de toute juridiction épiscopale
de Jean XXII de 1317.
Le prieur Antoine de Chavaroche loua le domaine de St Jean pour la somme de
915 livres. De cette somme il fallait donner à la communauté des
deux religieux la somme de 210 livres, somme qui sera portée en 1652
à 150 livres par religieux et 100 livres pour l’oblat venu renforcer
la communauté, soit 400 livres à déduire. Cette communauté
de l’Étroite Observance de Charles Frémon, nouvellement
créée, restera jusqu’en 1656. Ils édifieront par
leur piété et mortifications leurs voisins : “ils font revivre
en leurs personnes, le premier esprit de saint Étienne, leur père.”
dira l’un d’eux .
En 1654, le prieur de Vieupou et partant de là de St-Jean-les-Bonshommes,
Antoine de Chavaroche, fut élu Abbé général de Grandmont.
En 1657, le devis de réparation au prieuré fut établi,
il se montait à la somme de 18.643 livres. Il sera de beaucoup dépassé.
Le 1er août 1669 l’adjudication des bois est faite par le prieur
commendataire de Vieupou, Joseph Didier, pour : “le rétablissement
de ladite église, cloître, et dortoir, et autres lieux dudit prioré”
. La Maîtrise des Eaux et Forêts autorisa la vente des bois du monastère
au sieur Mocquot, 122 arpents de haute futaie pour le prix de 25.000 livres.
Mais les bâtiments restaurés n’abritent plus en 1673, qu’un
seul religieux. Dix ans plus tard, en 1683, il n'y a toujours qu'un religieux.
On note que : “les bâtiments et l’église sont en bon
état et environnés de tous côtés par un bois de haute
futaie et taillis de la contenance de 125 arpents, dont la coupe pourroit rendre
de douze à quinze cens livres, et est le revenu dudit prieuré
mil livres par an “.
Mais après cette date il ne semble plus y avoir de communauté,
aussi trouve-t-on le 19 juin 1677 cet acte :
Nous soussigné Antoine Mérat nommé par sa Majesté,
économe et administrateur du temporel du prieuré de Vieupou en
vertu des lettres-patentes du 28 janvier 1677 d'une part, et Jean Prescheur,
contrôleur ancien du grenier à sel d'Avallon d'autre part :
Sur les publications de la recepte de St Jean-les-Bonshommes l'une des annexes
dudit prieuré de Vieupou, que le sieur Prescheur était le dernier
metteur et enchérisseur reconnaissons avoir accordé ce qui suit
:
Ce à savoir que moi ledit Mérat en ladite qualité, reconnaît
avoir délivré et adjugé la ferme de St Jean-les-Bonshommes
audit sieur Pescheur pour le temps et l'espace de neuf années à
commencer pour les terres aux sombres de la présente année, et
la récolte l'année prochaine de tout ce qui dépend du revenu
dudit St Jean...
Je reconnais que M de Préfontaine, prieur de Vieupou m'a communiqué
le traité sous seing privé..;
Je soussigné certifie Charles de Cumes, écuyer, Sieur de Préfontaine,
prestre, bachelier de Sorbonne et prieur de Vieupou, avoir lu examiné
le traité.."
L’Abbé René-Pierre de la Guérinière avait
demandé que son ordre soit déchargé de l’obligation
du service religieux dans les annexes des prieurés, le Grand Conseil
accorda cette dispense le 17 mars 1736. C’était évidemment
signer la disparition de toute signification religieuse à d’anciens
lieux monastiques. Les prieurs commendataires en profitèrent, comme celui
de Vieupou pour faire desservir d’abord les messes de fondation par un
curé des environs; puis le prieur commendataire de Vieupou Hocart demanda
à ce qu’il soit déchargé de ce service. C’était
la fin de toute vie religieuse à Charbonnières et à Charnes
ainsi que dans de nombreux autres lieux grandmontains !
Pour preuve nous avons un échange de lettres de 1747, abordant ce problème
entre le prieur commendataire Hocart, et le prieur claustral, Dom Nicod :
“Châlons le 24 Janvier 1747,
“J’ai reçu avec un vrai plaisir, Mon Révérend
Père, la lettre polie, ainsi que les compliments obligeants que vous
m’avez adressés tant en votre nom que celui de votre communauté,
au sujet de la nouvelle année et je vous en remercie.
Vous me dites d’abord que vous n'acquitterez chez vous aucun service,
ni fondation pour mes deux annexes, qui sont Charnes proche de Sancerre, et
St Jean les Bonshommes, près d’Avallon, vous me demandez comment
je me conduis à cet égard. Dans l’un et l’autre endroit
il y a des chapelles. A St Jean c’est plutôt une grande église.
Je suis obligé de faire célébrer une messe basse tous les
dimanches de l’année, obligation que je fais remplir par des religieux
de cette ville, soit Minimes, soit Pères de la Doctrine, ou autres qui
veuillent bien s’en charger. Si l’arrêt du Grand Conseil de
1736 dont vous m’avez envoyé copie a lieu pour tous les bénéfices
de votre ordre, et que nous puissions comme vous me le dites, sans autre formalité
transférer le service d’Avallon à Vieupou, j’y consens
volontiers.
....
Autre lettre de Hocart à Dom Nicod
à Châlons le 13 mai 1747,
Je n’ai pas été plus malade qu’à l’ordinaire,
Mon Révérend Père, je suis toujours à peu de chose
près dans le même état depuis deux ans. Je ne vous en suis
pas moins obligé, ainsi qu’à toute votre communauté
de l’inquiétude que vous me témoignez avoir eu sur ma situation.
L’unique raison de mon silence depuis votre lettre du 11 février,
a été la bulle de 1317, que j’attendais de votre part. Comme
vous me l’aviez annoncé elle est enfin arrivée avec ma seconde
lettre que vous avez pris la peine de M Elvive le 24 avril dernier, contenant
un détail de visite par vous faites à St Jean les Bonshommes le
14 du même mois, je vais tacher de répondre à tous les articles
de vos lettres.
Premièrement : Je consens à la translation du service de mes annexes
dans votre maison de Vieupou, en conséquence de la bulle de Jean XXII
et de l’arrêté du 6 mars 1736, a commencer la desserte au
mois d’octobre prochain en supposant que le dit service soit d’une
messe par semaine pour chaque annexe, suivant la fixation de vos chapitres généraux.
Cela fera 104 messes qui a raison de 10 sols pour l’honoraire produisent
42 livres, mais comme je ne veux ni gagner, ni perdre dans ce changement, parce
que croyant en conscience ne pouvoir rien innover à ma charge, ni celle
de mes successeurs pour l’article de votre procureur général,
je ne prétends pas non plus rien diminuer de ce que je donnais pour l’acquit
de mes charges ordinaires, en les transférant chez vous aller me coutoit
135 livres par an; je vous offre la même somme, qui est bien au-dessus
de celle de 52 livres, mais à condition d’acquitter par vous quelques
services particuliers. A jour nommé qui peuvent être à ma
charge, et qui moyennant les 135 livres passeront dorénavant à
la votre, et dont annuellement vous me donnerez certificat d’acquit.
En second lieu, je me suis consulté sur l’article de votre Prieur
général, et ne puis en conscience imposer à mes successeurs.
Cette pension à payer nos partages sont fait par moitié, chacun
doit faire ses réparations en acquitter les charges. Je n’ai point
de tiers lot . Comme M l’abbé Ligier, votre prieur général
ne me rendant aucun service, je ne lui dois aucune indemnité pour celui-ci.
Ennemi des changements et des nouveautés, je ne veux point m’écarter
de la conduite de M l’évêque de Lavaur, mon prédécesseur,
qui plus a porté que moi de connaître toutes les charges et les
obligations du prieuré, n’a jamais reconnu cette dette.
Pour ce qui est des réparations urgentes et nécessaires que vous
m’annoncez à faire faire à l’église St Jean,
tout sera dit à cet égard si on n’y fait plus de service
à ma charge, et que la translation s’en passe à Vieupou.
Si vous changez de sentiment à cet égard, je donnerai des ordres
précis pour rétablir la décence tant dans l’église
que pour les ornements nécessaires à la célébration
des Saints mystères.
...
A l’égard de la suppression de l’église, du cloître,
ainsi que des lieux inutiles, qui y sont annexés, je vais vous répéter
il y a la même chose que j’ai déjà eu l’honneur
de vous mander. J’y consent de tous mon coeur, pourvu que vous vous chargiez
de l’exécution, et que je n’ai uniquement que ma signature
à donner. Ma faiblesse de jambes et de tête ne me permet pas d’entendre
par les affaires en discussion. En allant sur les lieux , vous avez bien vu
par vous-même l’inutilité de tous ces bâtiments, même
de l’église (le service une fois transféré) Vous
avez vu de plus que la démolition indemnisera et au-delà la dépense
que cette suppression occasionnera. Ainsi je remets cette entreprise entre vos
mains. Que la maison reste comme elle est j’y consent, je l’entretiendrai
de mon mieux. Faites ordonner la suppression d’une partie, j’y donne
aussi les mains, mais à condition que vous vous chargiez de tout, et
que je n’aurai à cet égard que ma signature à donner,
n’étant pas en état d’en faire davantage.
....
Pour la réception que l’on vous a fait à St Jean, dont vous
me paraissez mécontent, je ne puis vous rien dire à ce sujet,
sinon que j’en suis fâché, d’autant plus que je n’avois
pu y apporter de remède, quand bien même j’aurais annoncé
votre arrivée à mon bailli, ou à mon admodiateur, ils ne
se seraient pas plus déplacés pour vous que pour moi dans cette
occasion. Toute les fois que j’ai été dans ce pays là,
ou quelqu’un de ma part, nous avons toujours logé au cabaret, et
j’ai pris la peine d’aller chercher ces messieurs. Lorsque j’ai
eu besoin de leur ministère. C’est apparemment le style des gens
d’affaires. Je crains bien qu’il ne vous en arrive autant à
Sancerre, lorsque vous ferez le prieuré de Charnes. Au surplus mon bailli
la bas s’appelle M Douart, avocat en Parlement et notaire. Mon admodiateur
est le sieur Mauru. L’un et l’autre demeurant à Sancerre.
J’ai l’honneur d’être avec le plus parfait attachement,
mon Révérend Père, votre très humble et très
obéissant serviteur.
Hocart
Ce prieur commendataire devait décéder en 1758. Il fut remplacé
par Étienne-Gaston de Mastin, vicaire général d’Orléans,
Grand Chantre et chanoine; qui prit possession de son bénéfice
en 1759 , et qu’il gardera jusqu’en 1788.
Un projet de capter l'eau pour l'hôpital d'Avallon est envisagé.
"Simon-Jean Champion cy-devant arpenteur-juré de la maîtrise
particulière des Eaux et Forêts d'Avallon supplie Mrs les Maire
et échevins de cette ville de se rappeler que par leurs ordres, et sous
les yeux de M Mynard, avocat et syndic, il a procédé le 15 et
18 juin 1759, au bornage du champs.... Il a aussi accompagné à
St Jean-les-Bonshommes un architecte hydrolique envoyé par Mgr l'Intendant,
et a ensuite toisé la distance de la fontaine d'Annay jusqu'à
l'hôpital de cette ville, et a remis ce toisé à Mrs les
Magistrats" .
Ce problème de ravitailler Avallon en eau se représentera au XIXème
siècle, et de nouveau on repensera à la fontaine St Jean, mais
l'on n'y donnera pas de suite :
"Plusieurs voulaient faire venir la fontaine St Jean, qui se trouve entre
Sauvigny-le-Bois et Avallon. C'était une idée très simple,
la distance était peu considérable, le niveau de la source était
supérieur au sol de la ville, mais à la première sécheresse,
je constatai qu'elle ne donnait à peu près rien.. ".
Uni en 1770 au Grand séminaire de Sens, le prieuré de St-Jean-les-Bonshommes
qui possédait maisons, écurie, granges et dépendances avec
jardins, vergers, chènevières, 170 journaux de terre, 60 soitures
de pré, le tout dans un état plus que lamentable. Un procès-verbal
de visite du 23 février 1770 en fait foi. L’architecte résume
le problème : “Les travaux deviennent d’autant plus nécessaires
que depuis un temps immémorial les titulaires dudit prieuré se
sont contentés de ne faire que celles que l’on nomme locatives
ou usufruitières, et ont négligé les grosses réparations,
et que cette négligence pourrait entraîner la ruine totale des
dits bâtiments...” (voir la suite dans annexe). Ce constat est malheureusement
non celui de St.-Jean mais de l’ordre tout entier, qui n’était
plus que l’ombre de lui-même. Destruction ou déconfiture
?
Les bâtiments effectivement menaçaient ruines, et les terres et
prés avaient été laissés à l’abandon
depuis une vingtaine d’années au moins (voir en annexe le P.V).
Des "réparations sérieuses" furent entreprises. M Bresse,
Maître particulier des Eaux et forêts d'Avallon en fit la visite.
Les articles 14 à 22, concernant une grange, l’écurie aux
chevaux, une bergerie, et l’appartement du prieur commendataire de Mastin
furent l'objet de travaux; le tout pour une somme de 918 £ 8 sols , sur
un total de travaux urgent à faire s’élevant à 4.973
£ 12 sols !
La mense priorale fut affermée en 1783 par Étienne-Gaston de Mastin,
abbé commendataire de Saint Martin de Pontoise, prieur commendataire
de Saint-Jean-les-Bonshommes, demeurant à Paris boulevard Montmartre,
paroisse St Eustache, à Jacques Marault, avocat en Parlement à
Avallon, qui accepte pour "Mannoury de Bonnard, marchand de vin en gros,
demeurant ordinairement à Avallon, étant ce jour à Paris,
logé rue de la Martellerie, petit hôtel d’Aumont, paroisse
St Paul". Il a chargé le sieur Jacques Marault de louer le bien
consistant en maison, grange à Avallon et les dépendance à
St Jean, consistant en verger, terres labourables, prés, pâturages,
rentes en grains dues par le seigneur de Montréal, par le propriétaire
du moulin de Givry... bail fait pour la somme de 2.700 livres.
Bien national, Saint-Jean-les-Bonshommes fut vendu le 4 mars 1791 à 2
heures de relevé. Dans l’inventaire des biens nationaux de Sauvigny
il est porté de la manière suivante
Article 1er :
Biens du ci-devant prieuré de St Jean les Bonshommes consistant en corps
de bâtiment servant à loger le fermier, plusieurs granges, écurie,
jardin, verger, chènevières, une chapelle et un cloître,
146 journaux de terre, 40 soitures de pré, 78 arpents de bois en coupes
réglées attenant audit bâtiments; le tout affermé
à Edme Georges, par défaut sieur Jacques Moreau en son vivant
avocat à Avallon, fermier principal, par acte passé devant Moillat,
notaire à Avallon le 6 août 1783, moyennant la somme de 1800 livres
par an pour neuf ans consécutives, qui ont commencé à la
St Jean-Baptiste de l’année 1786.... ” . Plusieurs acquéreurs
se présentent et le bien est vendu en dernière enchère
au sieur Joseph Bailly pour la somme de 100.100 livres. Ce dernier apprend au
Procureur-syndic qu’il s’est porté acheteur :”tant
pour lui que pour Edme Bailly, marchand, Joseph Fourreau, marchand, Georges
Fourreau du même état, Jean Bourrey, même état, Jean-Baptiste
Bourrey, même état, tous demeurant audit Sauvigny le Bois, Lazare
Fourreau, même état et même lieu, et Edme Barré, marchand
de bois, demeurant à Coutarnoux. Tous ici présent et acceptant
chacun pour un huitième.
En conséquence les susnommés promettant et s’obligeant solidairement
entre eux et sans division, de payer ladite somme de 100.100 livres dans les
termes, et de la manière prescrite par le décret de l’Assemblée
Nationale.. "
Le 22 novembre 1791, les nouveaux propriétaires du prieuré refusent
de laisser descendre la cloche de la chapelle .
"Un état des effets et ornements qui sont trouvés dans la
chapelle du ci-devant prieuré de St Jean les Bonshommes représentait
par François Manoury fermier des revenus dudit prieuré ce jourd'hui
19 juin 1793" est dressé. Rien de grande valeur si ce n'est un calice
avec sa patène en argent pesant 2 marcs, un gros, et 24 grains . Le reste
n'est qu'ornements usagés, deux vieilles chasubles, une aube, trois nappes
d'autel, un missel, deux petits chandeliers de cuivre et un petit pupitre.
"Le secrétaire du district d'Avallon certifie que le frère
Hugues Manoury a déposé à l'administration les effets rapportés
au présent état, lequel dépôt a été
fait en présence des administrateurs du Directoire étant déchargé.
A Avallon le 19 Juin 1793, an 2 de la République
Après avoir eu plusieurs propriétaires successifs : " l’ancien
prieuré tenta en 1844 un prêtre du diocèse de Sens épris
de pénitence et de vie pauvre : le Père Jean-Baptiste Muard. Après
avoir étudié la règle de St Benoît dans un ermitage
près de l'abbaye de Subiaco, le père Muard désirait établir
une communauté bénédictine. Il pensa la fonder à
St Jean-les-Bonshommes, qui correspondait tout à fait à ce genre
de vie, mais le propriétaire refusa de le lui vendre ". Mais cette
version ne semble pas être tout à fait la bonne, car son biographe,
l'abbé Brullée, écrit dans son livre "la vie du R.P
Muard" paru en 1864, donc peu de temps après les faits :
"Le projet de son œuvre nouvelle lui vint le jour de l'anniversaire
de son baptême le vendredi 25 avril 1845, fête de St Marc, en revenant
de Venouse (Yonne) petit hameau proche de Pontigny, où il avait célébré
la messe."... De quel coté tourner ses pas ? Plusieurs emplacements
lui ont souri. Ce sont, d'un coté, d'anciennes maisons religieuses dont
les ruines seront facilement relevées; et de l'autre, des sites presque
sauvages mais complètement solitaires, où il faudra tout construire,
tout créer en quelque sorte; ces derniers auront sa préférence,
par la raison qu'ils sont plus en harmonie avec les austérités
de la pénitence, tandis que les autres offrent deux grands inconvénients,
ils sont trop rapprochés des villes, et trop facilement abordables ".
Mais c'est la vallée de la Cure qui attire le Père Muard. Son
autre biographe, Dom Denis Huerre O.S.B écrit : " De la remontée
de la Cure, il retient deux sites assez favorable, pense-t-il. L'un près
du château de Railly, lieu-dit "Le pré du moulin", l'autre,
dit Grasmouille, près du hameau de Chézelles...Grasmouille tente
beaucoup l'abbé Muard". L'abbé y reviendra plusieurs fois...
il charge l'abbé Cullin de l'achat, puis il se ravise et écrit
à l'abbé Cullin qu'il désire un emplacement un peu mieux
boisé, plus solitaire, plus éloigné des habitations. Ce
lieu est maintenant sous les eaux, un barrage y a été construit.
La famille de Chastellux lui offre l'ancienne Cordelle de Vézelay, qu'elle
a achetée récemment, parce qu'un de leurs ancêtres y est
inhumé . Il refuse, l'isolement du monde lui paraît essentiel.
Le 10 mai 1849, le père J.B Muard proposera à l'abbé Brullée
d'aller visiter le lieu de la Pierre-qui-Vire. C'est le coup de foudre; il y
fonde son monastère en 1850. Le père Muard ne devait pas survivre
de beaucoup à sa fondation, car il meurt prématurément
le 19 juin 1854, mais son austérité et sa sainteté devait
y attirer de nombreuses vocations.
Mais revenons à St.-Jean, en 1846, un grave incendie dévora les
toitures, les planchers et les boiseries intérieures des corps de logis
non voûtés , et tout ce qui pouvait brûler fut consumé,
ne laissant que le gros oeuvre sans protection aux intempéries. M Victor
Petit écrivait en 1870 : “Le dommage fut considérable, et
surtout bien regrettable sous le rapport archéologique. Le vieil édifice
fondé par Anséric de Montréal eût résisté
encore pendant des siècles aux atteintes des intempéries, des
saisons, tant la construction fut faite avec soin, intelligence et solidité
”.
Propriété à cette époque des frères Moiron,
le prieuré resta entre leurs mains jusqu’en 1875, date à
laquelle ils vendirent d'abord la "ferme de St Jean", puis le prieuré
en 1880, au Chef d'escadron d'artillerie Jules-Étienne Clément,
en garnison à Nevers . A cette époque le prieuré était
en bien triste état. "Hélas ces débris sont couverts
maintenant de ronces et de mousse. C'est en vain qu'une robe verdoyante voudrait
cacher ces ruines....Tout cela s'écroule, s'effrite..." s'exclame
l'abbé Maillot.
Le bien est mis aux enchères le samedi 6 février 1904 à
1h1/2 du soir . Le notaire avallonais Paul Neveux vend par adjudication au détail
"l'Abbaye de St Jean-les-Bonshommes", comprenant au finage de Sauvigny-le-Bois
:
Des bâtiments du XIIIème siècle, cours et jardins, 9 ha
10a environ de pré, 1 ha 27 ares de terre, et 1 ha environ de bois âgé
de 30 ans, le tout appartenant à un général d'artillerie
en retraite, Jules-Étienne Clément , ayant sa résidence
d'été au doyenné de Givry, et habitant Paris. C'est au
doyenné de Givry que se trouve actuellement la cheminée du prieur.
La vente ne dut pas se faire, et de nouveau on insère dans la "Revue
de l'Yonne " à peu près le même encart sauf que l'on
précise deux choses :
- La vente peut se faire en bloc ou au détail par lots.
- On peut traiter en s'adressant à MM Bernheim Frères, 58, rue
de Maubeuge à Paris. La vente était fixée au vendredi 26
février 1904.
Le bien fut vendu par lots. Un agriculteur de Chassigny, Pierre Lenclume, se
rendit acquéreur de 88 a 80 ca de terre qu'il revendra en 1911, ainsi
que de la chapelle (3a30), et du sol (22a44ca), qui l'entourait. Il commença
à se servir du prieuré comme carrière de pierres qu'il
vendait aux maçons du voisinage. La Société d’Études
d’Avallon émue de ce destin lança une souscription publique,
et contacta le propriétaire. Ce dernier ne voulait pas se séparer
de sa terre, aussi proposa-t-il la vente de la chapelle moyennant la somme de
1.000 f, mais à une condition...que la chapelle soit emportée
à Avallon, lui laissant la terre pour être transformée en
pâture !
Après consultation des différents membres de la société,
on envisagea, qu’après avoir transporté la chapelle à
Avallon, on y installerait sa bibliothèque et le musée lapidaire.
“Qu’avons-nous besoin d’Hercule ?
Ne comptons-nous pas dans la société des membres assez puissants
par leur situation, leur influence, par leur science, par leur dévouement
surtout, pour accomplir ce travail, que la postérité rangera,
si elle le veut, et si elle daigne s’occuper de nous, à la suite
des douze travaux d’Hercule.
Il s’agit donc de transporter à Avallon même ce bel édifice,
qui porte si vaillamment sept siècles d’existence, pour installer
la bibliothèque et le musée. Il se prêtera admirablement
à sa nouvelle destination. M le Président, à qui Victor
Petit semble avoir légué son crayon...”
“...disposition précieuse pour nous, aucune fenêtre n’est
percée dans les murs de cette nef, de telle sorte que nous pourrions
élever à une certaine hauteur, des galeries dans le genre du musée
de Cluny, qui desserviraient la bibliothèque et les objets d’art,
peintures et sculptures craignant l’humidité du sol”.
Et cerise sur le gâteau, la porte de la salle capitulaire aurait été
disposée devant la chapelle : “à la manière des anciens
porches” .
Ce projet heureusement avorta, car à la suite de la visite de l’Inspecteur
Général des Monuments Historiques, M Selmersheim, en 1905, celui-ci
demanda à ce que la Société acheta non seulement la chapelle,
mais tous les bâtiments autour. Il promit que la Société
recevrait pour cet achat une subvention des Beaux-arts. Il était grand
temps, déjà le grand réfectoire était livré
aux maçons du voisinage comme carrière de pierre. Après
d’interminables négociations la cession du bien fut arrêtée
en mai 1905 pour la somme de 4.000 fr.; bien consistant dans l’ensemble
des bâtiments, plus une bande de terrain l’isolant de la prairie
.
Le compte rendu de la séance de la Sté d’Études d’Avallon
du 3 août 1905, confirme ce renseignement :
“Le président rend compte de l’état de la question
du prieuré St Jean. M Lenclume a refusé de traiter au prix de
3.000 f. M Selmersheim, informé, a répondu que la Commission des
Monuments Historiques avait donné un avis favorable pour le classement
du prieuré et voté une subvention de 2.000 f à la Société
d’Études pour l’aider a se rendre acquéreur de l’ensemble
du prieuré. M Giraud a obtenu de M Lenclume une offre ferme de traiter
à 4.000 f pour l’immeuble et le terrain. La société
accepte cette condition et une souscription est immédiatement ouverte”
.
Il faut rendre grâce aux généreux donataires qui par leur
action ont sauvé ce très beau monument de l’ordre, en particulier
à Ernest Petit, qui habitait le magnifique prieuré de Vausse (ordre
du Val des Choues), s’inscrivit au premier rang; ainsi que l’abbé
Alexandre Parat, auteur de nombreuses monographies et d’études
sur l’Yonne, qui habitait un ancien prieuré de l’ordre limousin
de l’Artige: Bois d’Arcy . Les personnalités politiques et
religieuses eux aussi ont contribué à ce sauvetage : M Billardon,
maire d’Avallon, Mgr Ardin, archevêque de Sens, ainsi que des associations
: la Société des sciences de l’Yonne et le Touring-Club
de France.
L’acte fut établi le 11 octobre 1905, et la Société
obtint son classement comme Monument Historique par arrêté ministériel
le 14 novembre de la même année, et cela grâce au concours
de l’abbé J.Giraud et du sculpteur Georges Loiseau-Bailly.
Dans un premier temps il fut nécessaire de clôturer le bien, qui
était toujours la proie des vandales, surtout les jeudis et dimanches
dit-on. Ce ne fut pas suffisant, et on dut se résigner à embaucher
un gardien. On restaura le bout de l’aile Sud pour le loger.
Une première restauration fut entreprise; le toit de la chapelle en fut
l'objet en 1908. Puis plusieurs autres campagnes furent entreprises :
1912 : On refait la clôture, le chemin d'accès, on plante la haie
au nord de l'église. La maison du gardien (bâtiment sud) voit sa
toiture, et son plancher refait.
1925 : Les fenêtres du cellier sont remontées.
1937 : On consolide la porte de la salle capitulaire donnant sur le cloître.
La charpente de l'église est un peu modifiée, afin de soulager
la voûte, et on remplace les tuiles défectueuses. L'angle de la
cellule du correcteur au-dessus du passage est refait.
La guerre vient, et durant cette période malheureuse la Société
ne peut rien faire.
En 1960, on restaure la salle capitulaire. Son mur Est extérieur, partiellement
écroulé, et la partie droite de l'entrée de la salle capitulaire
sont remontés avec les pierres taillées et les colonnettes qui
gisaient sur le lieu même .
Il faudra attendre 1979; sous l'impulsion de son nouveau président, le
Docteur Jean Campagnac, les travaux reprennent.
1983 : Reprise des glacis, de l'auvent en tuiles, et d'un mur de refend par
les jeunes du chantier "Concordia".
1986 : On refait l'encadrement des fenêtres et la voûte du choeur.
1993 : Réfection et consolidation de la voûte de la nef.
1994 : C'est le tour de la lancette du pignon ouest.
1995 : On procède à différents travaux de consolidation
en maçonnerie.
1996 : Des travaux d'étanchéité sont faits sur la façade
et les murs.
1997 : Des étais sont posés pour soutenir la voûte du chartrier,
solution provisoire évidemment.